
Le Groupe BETOM (BETOM Ingeniere, Cap Terre, IDéAM) intervient dans la conception-réalisation de bâtiments depuis maintenant plus de cinquante ans. Par nature, notre métier nous donne un prisme d’observation privilégié des tendances, qu’elles soient durables ou de simples effets de modes. Témoignage de Cédric Nicard, Directeur chez Cap Terre, pour qui l’immobilier est un levier de la transition urbaine.
« A l’orée des premières règlementations thermiques, l’économie d’énergie (comprendre financière donc) était le facteur déterminant du recours à un bureau d’études tel que le nôtre. S’en est suivie une quête de confort intérieur puis une tentative de résolution des enjeux d’équilibre performance/confort par la technologie. Les smart-building sont nés, pleins de promesses de modernité et de service de proximité. Mais le pragmatisme nous a tous rattrapé car le secteur avait alors oublié que l’intelligence ne se trouvait pas dans les machines mais dans les occupants des bâtiments dont la raison d’être première est d’assurer un abri de qualité aux activités humaines.

Le pragmatisme semble aujourd’hui à nouveau de mise dans l’acte de construire et d’exploiter. Mais rappelons que l’urgence climatique n’est plus devant nous, elle est sur nous. L’ensemble du secteur du bâtiment a déjà bien engagé des mesures visant à limiter son impact. Matériaux de construction bas carbone, raccourcissement des flux d’approvisionnement, rationalisation des surfaces artificialisées, etc. Mais ce n’est aujourd’hui plus suffisant.
La sobriété demeurera essentielle mais elle doit aujourd’hui s’accompagner de mesures d’adaptation visant à engager une démarche de résilience urbaine. Les ilots de chaleur urbains sont notamment des pièges dans lesquels il est aujourd’hui fréquent de tomber, ils créent des « bulles » aggravant localement les effets du dérèglement climatique et entraînent directement un inconfort accru dans les immeubles ainsi qu’un vieillissement prématuré des équipements techniques. Il est aujourd’hui prouvé que la climatisation des immeubles est non seulement un pansement sur une jambe de bois, mais également qu’elle aggrave la situation. Solutions passives et apport de biodiversité sont des premières solutions désormais plus largement déployées. Inondations, manque d’eau et phénomène de retrait-gonflement des argiles fragilisant et endommageant les structures sont d’autres enjeux physiques indissociables.
Mais la résilience est aussi sociale. Dans un contexte de crises environnementale, sociale, économique et sanitaire, les individus doivent non seulement s’adapter mais également retrouver leur place pour redonner un sens aux espaces urbains. Pour cela, la transition (car finalement la démarche de résilience étant dynamique, elle ne se planifie pas et constitue une brique de transition) doit être rendue acceptable et en un sens sexy. Les démarches artistiques y contribuent, citons par exemple le cas du quartier Jussieu à Versailles où un important plan de travaux d’isolation thermique est couplé avec la réalisation de fresques géantes sur les pignons de bâtiments. Les initiatives de fermes urbaines y jouent un rôle également essentiel, qu’elles soient durables ou intégrées dans un urbanisme transitoire, elles créent un cadre de sensibilisation multigénérationnel mais aussi un terreau d’échange social essentiel à une vie de quartier.
Raison d’être, sobriété et résilience, portées de l’échelle du bâtiment à celle des quartiers et des villes, sont les leviers essentiels de la contribution de l’immobilier à la transition urbaine. »